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Un des hommes les plus oubliés de ce temps-là, un de ceux du moins que la plupart des historiens se contentent de nommer, c’est le duc de Mercœur, l’intrépide ennemi de Henri IV, qui lui résista plus longtemps que Mayenne, plus longtemps que la Ligue et que Philippe II. Désarmé à la fin, c’est-à-dire gagné, apaisé (à de telles conditions qu’on tînt secrets vingt-trois articles du traité) et ne sachant alors plus que faire, il s’en alla servir en Hongrie, combattit les Turcs, en attaqua un jour toute une armée avec cinq mille hommes, puis, vaincu encore par là et s’en revenant en France, mourut de la fièvre à Nuremberg, dans son lit, à l’âge de quarante-quatre ans.

Saint-Malo vient de me le mettre en mémoire. Il s’y heurta toujours et ne put jamais l’avoir pour sujet ni pour allié. Ils entendaient en effet faire la guerre pour leur propre compte, le commerce par leurs propres forces, et quoique ligueurs au fond, repoussaient le duc tout en ne voulant pas du Béarnais.

Quand le sieur de Fontaines, gouverneur de la ville, leur eut appris la mort de Henri III, ils refusèrent de reconnaître le roi de Navarre. On prit les armes, on fit des barricades. Fontaines se renferma dans le château, et chacun resta sur la défensive. Peu à peu ils empiétèrent. D’abord ils exigèrent de Fontaines qu’il déclarât vouloir les conserver dans leurs franchises. Fontaines céda, espérant gagner du temps. L’année suivante (1589) ils choisirent quatre généraux indépendants du