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se trouvent des tronçons au hasard. Les arbres cessent un peu, un grand mur gris de chaque côté. Nous apercevons au bout une plaine et quelques maisons rouges à l’entrée : c’est Gravia, où nous devons coucher. Descente.

Gravia, au pied de la montagne. — Khan avec un foyer sans cheminée, des Grecs y font cuire des morceaux de viande sur des brochettes de bois. — Nous attendons le bagage ; on nous loge dans un compartiment du khan réservé aux gens de qualité : la cloison est en planches non rabotées, pour plafond les tuiles, entre quatre pierres le feu, mais nous sommes séparés du reste de la société ; aux pieds de mon lit, une trappe où l’on serre le grain ; la veste du cuisinier se sèche à notre feu, à côté de mon paletot.

La nuit promet d’être froide, j’entends rouler le bruit permanent du torrent et, de temps à autre, sonner les clochettes des mulets qui sont ici, à côté, dans l’écurie.

Gravia, 9 heures du soir.

Jeudi 9. — En sortant de Gravia nous trottons une grande demi-heure et nous atteignons le pied de la montagne. Elle est couverte de chênes, nous allons sous les arbres, nous sentons le vent du matin et l’odeur des feuilles mortes. Quand nous sommes arrivés au pied du bois taillis, sur la berge, un rayon de soleil illuminait par en bas les chênes : c’était la France au mois de novembre tout à fait.

La route monte et descend sous les arbres ; troncs tout gris, sans une feuille, couchés par terre avec leurs moignons de branches biscornues. (Avant d’arriver à Livadia, il y en avait ainsi sur le bord