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rière, ce qui faisait que les tombes et les arbres vus à travers les mailles, étaient comme à travers une gaze brune. Plus loin, d’autres filets étaient couchés sur les tombes ; les stèles, çà et là, les levaient en vagues. — Abordés aux Eaux douces : ancien kiosque du Sultan, pourri et qui tombe dans l’eau ; jolie petite fontaine carrée, soldats à un corps de garde. Que de corps de garde et de casernes à Constantinople ! Nous passons dans un champ où Stéphany demande la route à des femmes grecques qui jardinent, chemin boueux, pelouse entourée de montagnes, grands arbres au pied. — Café, Stéphany joue une espèce de partie de trictrac avec des dames jaunes et noires. — Nous revenons par le même chemin ; au pied de la fontaine un chien me caresse. — Revenus très vite à Constantinople. — À Top-Hana, rencontré une pipe qu’on ne veut pas me vendre. — Le soir, dîner à l’ambassade, chez le général Aupick.

Samedi. — Resté à l’hôtel toute la journée.

Dimanche 8. — Visite à Fagniart, qui demeure sur le petit champ des morts de Péra. Je descends le champ des morts et je m’enfonce au hasard dans le quartier de Saint-Dimitri : une longue rue où coule un ruisseau sur de la boue, un côté de la rue bordé par un mur de planches, marchands de tabacs, cafés grecs où l’on est enfermé en fumant des pipes, à la chaleur d’un mangal qui brûle ; sur un trottoir en terre, une vieille négresse qui demande l’aumône. Je monte par une rue très escarpée, campagne, herbe rase, grand vent, une caserne avec des casemates en corps de logis avancés. Je monte sur la hauteur et je vois Constantinople, qui me paraît démesuré