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Tekeh des derviches hurleurs. — Pièce carrée, balustrade tout autour. Sur la muraille du côté où est le Merab, instruments de supplice à l’usage des hurleurs : longues broches terminées par une espèce de palette recourbée et espèces de coins ronds terminés par des pointes ; de la partie supérieure du cône, chaînettes. Sur des planches tout autour sont rangés de grands tambours de basque, des cymbales et de petits tambourins. On a commencé par des prières. — Iman, vieillard grisonnant ; son fils, figure impassible, joues un peu bouffies, nez régulier, droit, un peu de petite vérole au bout, robe verte garnie de fourrure de renard, immobile dans sa pose à genoux. — La file s’est ébranlée : pas de costume particulier, il y avait dedans des soldats turcs, plusieurs vêtus à l’européenne. — Le chef d’orchestre, petit, noir, remuant tout et menant tout ; le chef des cérémonies, gros bonhomme en robe puce, ressemblait un peu à Soliman-Pacha. — Un vieux, rien qu’avec son takieh, assis par terre et chantant. — Jeune homme en pantalon, en petit turban, ressemble à Biery, s’est mis à la fin à pleurer à chaudes larmes.

Cela m’a semblé plus musical que ceux que nous avions vus au Caire, la voix de dessus dominant et passant à travers les hurlements. Un moment, ça a ressemblé au bruit du piston d’une machine à vapeur ; d’autres fois, en fermant les yeux, à deux ou trois lions en cage et rugissant. — Vers la fin de la cérémonie, malades venant se faire marcher sur l’endroit malade par l’iman ; aux petits enfants, il faisait seulement des passes avec la main et les insufflait.