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mettent les queues de rat que l’on allume contre le rebord de la muraille, nous en avons allumé comme les autres. Le prêtre grec a pris une rose, l’a jetée sur la dalle, y a versé de l’eau de rose, l’a bénite et me l’a donnée ; ç’a été un des moments les plus amers de ma vie, c’eût été si doux pour un fidèle ! Combien de pauvres âmes auraient souhaité être à ma place ! comme tout cela était perdu pour moi ! que j’en sentais donc bien l’inanité, l’inutilité, le grotesque et le parfum ! — Une femme d’environ 50 ans, maigre, laide, pâle, est venue et frappait sa poitrine sèche de ses mains maigres.

En face, église grecque : retable à 7 arches. — Je n’ai jamais vu de cierges si gros, ce sont des arbres. — Au-dessus de la principale arcade du retable, élevée et en dehors du niveau du retable, une sorte de chaire en forme de balcon, d’où, aux jours de fête, le patriarche donne la bénédiction. Du bas de ce balcon en tambour s’envolent 5 colombes (Saint-Esprit) qui tiennent au bout d’un fil, à leur bec, des boules bleues ; cela me rappelle les langues de Babylone dont parle Philostrate dans la Vie d’Apollonius. Au milieu de l’église grecque, dans une espèce d’urne ronde, boule de marbre blanc rayé d’une bande noire, qui marque la place où l’ange est apparu aux saintes Femmes.

On monte au Calvaire par un escalier de dix-neuf marches. Il est séparé en deux. Une moitié appartient aux Grecs, la plus luxueuse ; la seconde aux Latins. Partout lampes, marbres de couleur ; mais surtout et chez tous, mauvais goût révoltant.