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à l’entour. Ça puait très fort, c’était beau comme franchise de saleté. Ainsi disait un homme à rapprochements et à allusions fines : « Dans la ville sainte, la première chose que nous y vîmes, c’est du sang ».

Tout était silencieux, nous n’entendions pas de bruit, personne ne passait ; çà et là, le long du mur et nous faisant place, quelque juif polonais, long, barbu, avec son gros bonnet de poil de renard ; les bazars sont fermés. C’est le Baïram, ce qui fait, à toutes les évolutions religieuses de la journée et de la nuit musulmanes, tirer une quantité emphatique de coups de canon. Les devantures des boutiques semblent rongées par la poussière et quelques-unes tombent en ruines. Elles sont couvertes, longues, étroites et d’un bel effet comme perspective.

Tout est voûté à Jérusalem ; de temps à autre, dans les rues, on passe sous une moitié ou sous un quart de voûte ; les maisons se sont établies dans ces anciennes constructions, et partout on a des voûtes sur sa tête. Sauf les environs du quartier arménien, qui sont très balayés, tout est fort sale ; le pavé est presque impossible pour les chevaux, dans la rue de notre hôtel, un chien jaune pourrit tranquillement au beau milieu, sans que personne songe à le pousser ailleurs ; les m..... le long des murs sont effrayantes de mauvaise qualité ! Mais il y a pourtant moins de débris de pastèques qu’à Jaffa.

Ruines partout, ça respire le sépulcre et la désolation ; la malédiction de Dieu semble planer sur la ville, ville sainte de trois religions et qui se crève d’ennui, de marasme et d’abandon. De