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II[1]


LA FEMME AU POIGNARD vient sourire au nez de saint Antoine, tourne la tête de côté et montre ses dents, en roulant des yeux.

Je suis l’Adultère ! Le cœur de l’homme se trempe à mon haleine et toujours je voltige dans les sommeils, tel qu’un papillon renfermé dans la moustiquaire des lits. D’un bout du monde à l’autre bout, j’attire les corps qui doivent se joindre. Entre les volontés, se glisse ma fantaisie, et, jusque dans l’amour heureux, je creuse des abîmes, où tournoient d’autres amours !…

T’ont-ils conté ce qu’ils rêvaient, les adolescents pensifs ?

L’épouse se relève nu-pieds et s’avance à tâtons dans le couloir obscur. Sa chemise, humide de la moiteur de son corps, agite, en passant, la flamme

  1. Pages 269 et suiv. du manuscrit de 1849.