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première version

les fontaines, elle fait pousser la barbe, elle fait craquer l’écorce des pins qui se balancent dans les forêts. Donnez-lui quelque chose, car elle déteste les avares !

La boîte s’entr’ouvre, et l’on aperçoit, sous un pavillon de soie rose, une petite image de Cybèle tout étincelante de paillettes, dans un char de pierre couleur de vin traîné par deux lions crépus la patte levée. Les paysans se poussent pour mieux voir, l’homme qui danse tourne toujours, celui qui bat son tambourin frappe plus fort, et l’archi-galle continue :

Son temple est bâti sur le gouffre par où les eaux du déluge qui finissait se sont précipitées. Il a des portes d’or, un plafond d’or, des lambris d’or, des statues d’or. Apollon y est, Mercure, Hythia, Atlas, Hélène, Hécube, Pâris, Achille et Alexandre. Des aigles, des lions, des chevaux et des colombes se promènent dans sa cour. À son grand arbre qui brûle, on accroche des tuniques et des coffrets, et c’est pour elle qu’est dressé le phallus de cent vingt coudées, où l’on grimpe avec des cordes, comme au tronc d’un palmier, quand on va cueillir les dalles.

Ils se donnent avec leurs fouets de grands coups dans le dos, en cadence.

Frappez du tambourin ! sonnez les cymbales ! soufflez dans les flûtes à larges trous !

Elle aime le poivre noir que l’on va chercher dans les déserts. Elle aime la fleur de l’amandier, la grenade et les figues vertes, les lèvres rouges,