Page:Flaubert - La Première Tentation de Saint Antoine, éd. Bertrand, 1908.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
199
première version
noir, avec les poils de la queue doubles, un triangle blanc sur le front et la marque d’un aigle sur le dos. Sa housse de pourpre est déchirée, il boite de la cuisse gauche.
APIS

Où sont mes prêtres chaussés de byblos, qui brossaient mon poil, en chantant, sur un air lent, des paroles sacrées !

ANTOINE, riant.

Ah ! ah ! quelle sottise !

LE DIABLE

C’est un Dieu qui pleure ! écoute !

APIS

Du côté de la Lybie, j’ai vu le Sphinx qui fuyait : il galopait comme un chacal. Les crocodiles ont laissé tomber au fond des lacs les pendants d’oreilles qu’ils portaient à la gueule. Les dieux à tête d’épervier ont les épaules blanchies par la fiente des oiseaux, et le ciel bleu passe tout seul sous la porte peinte des temples vides.

Où irai-je ? J’ai brouté l’Égypte jusqu’au dernier brin d’herbe. Je me traîne au bord du fleuve, je souffre de plus en plus à la blessure que m’a faite Cambyse.