Page:Flaubert - La Première Tentation de Saint Antoine, éd. Bertrand, 1908.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
LA TENTATION DE SAINT ANTOINE

et les serments d’amour et les résolutions vertueuses.

J’ai bâti des architectures étranges dont j’ai ciselé les feuillages avec l’ongle de mes pattes. C’est moi qui ai suspendu des clochettes au tombeau de Porsenna. J’ai inventé les idoles à quatre bras, les religions dévergondées, les coiffures ambitieuses.

Je pousse les matelots aux voyages d’aventure : ils aperçoivent dans la brume des îles avec des pâturages verts, des dômes, des femmes nues qui dansent et ils sourient à toutes ces ivresses qui chantent dans leur âme, au milieu des grands flots se refermant sur le navire sombré.

Saint Antoine se promène entre les deux bêtes dont les gueules lui effleurent l’épaule.
LE SPHINX

Ô Fantaisie, fantaisie ! emporte-moi sur tes ailes pour désennuyer ma tristesse !

LA CHIMÈRE

Ô inconnu ! inconnu ! je suis amoureuse de tes yeux ! Comme une hyène en chaleur, je tourne autour de toi, sollicitant les fécondations dont le besoin me dévore.

Ouvre la gueule ! lève tes pieds ! monte sur mon dos !