Page:Flaubert - La Première Tentation de Saint Antoine, éd. Bertrand, 1908.djvu/174

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
128
LA TENTATION DE SAINT ANTOINE
à plusieurs tours sur le visage, et écarte de sa tête ses gros anneaux d’or, en soulevant le bout de ses oreilles. La brise colle contre son ventre sa robe d’été qui s’agite derrière elle, en claquant à l’air, comme un drapeau.


Un pasteur s’avance vêtu d’un manteau jaune attaché autour de son front par un cercle d’airain. Il porte un bâton recourbé et marche gravement dans des sandales en peau de bouc.
Il s’approche, — ils sont face à face, — ils se parlent bas. L’homme retire de son doigt une bague d’argent, de sa tête le cercle d’airain, dépose son bâton, et LA FEMME passe la bague à son doigt, le cercle à son bras, prend

le bâton et dit :

Tout de suite !… là !…

LE PASTEUR

Mais les crottes de bouc abîmeraient ta belle robe.

Ils s’éloignent et le pasteur reprend :

Il doit y avoir, aux environs, quelque citerne abandonnée…

LA FEMME

Tu es sot comme un enfant, pasteur à barbe longue !

LE PASTEUR, en riant.

Quelle joyeuse fille tu fais ! toi. Je voudrais bien voir ta figure.