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fallu consacrer d’importantes ressources et une bonne partie de nos forces militaires à l’organisation de la défense dans la région du Rhône. D’autre part, la France a cessé d’être la seule grande puissance sur la Méditerranée, et son influence séculaire dans le Levant est aujourd’hui menacée par l’active et intelligente concurrence de l’Italie »[1]

Et ce n’est pas tout. Solférino, Castelfidardo, Sadowa et Sedan sont les quatre étapes de la même route.

En 1866, toujours pour servir l’Italie, Napoléon III prépare l’unité allemande. « Hanté du désir d’assurer la possession de la Vénétie à Victor-Emmanuel, il lui conseilla d’adhérer aux propositions d’entente faites par Bismarck et l’engagea à traiter avec la Prusse contre l’Autriche »[2].

Cette politique n’eût pas été possible sans la complicité de l’opinion publique française. Et cette opinion était en grande partie celle de contemporains de Frédéric Moreau, de ceux qui étaient arrivés à l’âge d’homme entre 1840 et 1848, et avaient fait leur éducation politique à cette époque sous des influences romantiques. Ils voyaient dans la politique extérieure de Napoléon III la réalisation d’une partie de leurs rêves de jeunesse et ne prévoyaient pas les conséquences, qui pèsent aujourd’hui si lourdement sur nous et sur l’Europe.


NOTES.


LES ÉBAUCHES.


Au mois de novembre 1863, Flaubert achevait le Château des Cœurs, dont il ne lui restait plus que les vers à écrire, et au mois de février suivant, il écrivait aux frères de Goncourt : « J’ai fait le plan de deux livres qui ne me satisfont ni l’un ni l’autre. Le premier est une série d’analyses et de potins médiocres sans grandeur ni beauté. » C’est sous cet aspect que, pour la première fois, nous apparaît l’idée de l’Éducation sentimentale. Jusqu’au mois de septembre, Flaubert rassemble, selon son procédé rigoureux d’exactitude, une importante documentation, et d’après les scénarios multiples trouvés dans ses papiers, nous voyons peu à peu le livre atteindre une ampleur imprévue dès le début. Après

  1. Albert Malet. Histoire contemporaine, p. 444.
  2. Idem, p. 462.