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après l’échec du Candidat et tout en s’occupant de faire jouer le Sexe faible, que Flaubert rassembla les premiers éléments de la documentation de Bouvard et Pécuchet. « Je vais commencer un livre qui va m’occuper pendant plusieurs années. Quand il sera fini, si les temps sont plus prospères, je le ferai paraître en même temps que Saint Antoine. C’est l’histoire de ces deux bonshommes qui copient une espèce d’encyclopédie critique en farce. Vous devez en avoir une idée ! Pour cela il va me falloir étudier beaucoup de choses que j’ignore : la chimie, la médecine, l’agriculture. Je suis maintenant dans la médecine, mais il faut être fou et triplement frénétique pour entreprendre un pareil bouquin. » (Lettre à Mme Roger des Genettes, Correspondance, IV, p. 121.) Aimant, depuis l’enfance, à flétrir l’esprit bourgeois, à critiquer chez ses contemporains les idées sans art, les pensées stupides et niaises, Flaubert avait trouvé, dans Bouvard et Pécuchet, le sujet convenant le mieux à sa nature. Aveuglé par un désir inaltérable de raillerie, poussé par la haine de la bêtise humaine, le plan de son roman s’élargit démesurément, et c’est par morceaux que nous trouvons : feuillets, journaux, notes, prospectus, circulaires, formules administratives, annonces commerciales, enseignes, phrases informes, notes sur la chimie, la médecine, le jardinage, fragments de discours politiques, bourrés de lieux communs, de termes impropres, formant la prodigieuse documentation de Bouvard et Pécuchet. L’idée du livre est connue des amis qui lui restent encore : MM. Laporte, Baudry, Guy de Maupassant et l’éditeur Charpentier ; chacun lui envoie des trouvailles de niaiseries ou des renseignements demandés sur la chimie, la botanique et l’agriculture, etc. M. Laporte en particulier fut non seulement l’ami le plus fidèle de ses dernières années, mais le collaborateur assidu de l’œuvre en préparation ; c’est lui qui réunit en grande partie la documentation de Bouvard et Pécuchet.


L’ÉCRITURE
DE
BOUVARD ET PÉCUCHET.


« Je lis maintenant des livres d’hygiène. Oh ! que c’est comique ! Quel aplomb que celui des médecins ! quel toupet ! quels ânes, pour la plupart ! Je viens de finir la Gaule poétique du sieur Marchangy. Ce bouquin m’a donné des accès de rire. » (Lettre à George Sand, Correspondance, IV, p. 195.)