Page:Flaubert - Bouvard et Pécuchet, éd. Conard, 1910.djvu/121

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’Homme, et, embarrassés, ils songèrent à Vaucorbeil.

Ses menaces n’avaient pas eu de suites. Comme autrefois, il passait le matin devant leur grille, en raclant avec sa canne tous les barreaux l’un après l’autre.

Bouvard l’épia, et l’ayant arrêté, dit qu’il voulait lui soumettre un point curieux d’anthropologie.

— Croyez-vous que le genre humain descende des poissons ?

— Quelle bêtise !

— Plutôt des singes, n’est-ce pas ?

— Directement, c’est impossible !

À qui se fier ? Car enfin, le docteur n’était pas un catholique !

Ils continuèrent leurs études, mais sans passion, étant las de l’éocène et du miocène, du Mont-Jurillo, de l’île Julia, des mammouths de Sibérie et des fossiles invariablement comparés, dans tous les auteurs, à « des médailles qui sont des témoignages authentiques », si bien qu’un jour Bouvard jeta son havresac par terre, en déclarant qu’il n’irait pas plus loin.

La géologie était trop défectueuse ! À peine connaissons-nous quelques endroits de l’Europe. Quant au reste, avec le fond des océans, on l’ignorera toujours.

Enfin Pécuchet ayant prononcé le mot de règne minéral :

— Je n’y crois pas au règne minéral ! puisque des matières organiques ont pris part à la formation du silex, de la craie, de l’or peut-être ! Le diamant n’a-t-il pas été du charbon ? la houille un