Page:Flaubert - Bouvard et Pécuchet, éd. Conard, 1910.djvu/108

Cette page a été validée par deux contributeurs.

en manteau, qui gesticulait d’un air de commandement.

— Eh bien ! quoi ! fiche-nous la paix.

Et ils continuèrent leur besogne ; Bouvard sur la pointe des orteils, tapant avec sa pioche ; Pécuchet, les reins pliés, creusant avec son pic.

Mais le douanier reparut plus bas, dans un vallon, en multipliant les signaux ; ils s’en moquaient bien ! Un corps ovale se bombait sous la terre amincie, et penchait, allait glisser.

Un autre individu, avec un sabre, se montra tout à coup.

— Vos passeports ?

C’était le garde champêtre en tournée, et au même moment survint l’homme de la douane, accouru par une ravine.

— Empoignez-les, père Morin ! ou la falaise va s’écrouler !

— C’est dans un but scientifique, répondit Pécuchet.

Alors une masse tomba, en les frôlant de si près, tous les quatre, qu’un peu plus ils étaient morts.

Quand la poussière fut dissipée, ils reconnurent un mât de navire, qui s’émietta sous la botte du douanier.

Bouvard dit en soupirant :

— Nous ne faisions pas grand mal !

— On ne doit rien faire dans les limites du Génie ! reprit le garde champêtre. D’abord qui êtes-vous pour que je vous dresse procès ?

Pécuchet se rebiffa, criant à l’injustice.

— Pas de raisons ! suivez-moi !

Dès qu’ils arrivèrent sur le port, une foule de