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CORRESPONDANCE

« Le Mot d’ordre » et les autres feuilles de même couleur !

Quel gâchis !

À Falaise, j’ai rencontré Mme Lepic qui m’a enlevé (à mon âge, c’est flatteur) jusqu’à Rabodanges, où j’ai passé vingt-quatre heures.

Dans un petit village aux environs de Caen et qui s’appelle Allemagne, j’ai fait une découverte, celle d’un tombeau portant cette inscription : « À Rose Hesnard, souvenir à la compagne du proscrit. L. P. B. 1852. »

Il paraît que le prince Bonaparte vient tous les ans y faire une visite. Voilà, du moins, ce que m’a dit mon cocher de louage. Saviez-vous cette histoire-là, peu mienne du reste ? Goncourt ne me donne jamais de ses nouvelles. Je sais seulement par Charpentier, notre éditeur, qu’il lui propose pour le jour de l’an une Marie-Antoinette, édition de luxe.

Moi, je suis comme vous, Princesse, je suis tanné de Marie-Antoinette ; on en a assez parlé. À propos de personnages historiques, ne croyez pas, je vous prie, que j’aie pleuré le père Thiers. Mon amour du style s’y oppose. C’était le roi des Prud’hommes. Mais, comparé aux autres Prud’hommes, quelle supériorité ! Nous en avons et en aurons de pires !

Jamais la maudite politique ne m’a tourmenté comme maintenant ! Quand serons-nous tranquilles !

Je vous baise les deux mains longuement et suis, chère Princesse, en monarchie, république ou empire,

Votre vieux fidèle.