Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 8.djvu/260

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
254
CORRESPONDANCE

1842. À SA NIÈCE CAROLINE.
Mercredi soir [16 avril 1879].

[…] Mon déjeuner de dimanche n’a pas été ce que tu crois ! Ah ! Sais-tu ce qu’ont fait mes deux Anges après le repas ? Un somme ! L’une (Mme Pasca) sur mon divan, et l’autre (Mme Lapierre) dans un fauteuil ! Pendant qu’elles dormaient, j’ai travaillé à ma table tranquillement, comme un petit père tranquille. Rien de plus vertueux et de plus commode ! Leurs provisions de bouche étaient d’ailleurs excellentes et abondantes. Il m’en est resté jusqu’au surlendemain.

Ton Vieux a eu ce matin une colère violente au spectacle du premier numéro de la Vie Moderne[1], rédacteur en chef Bergerat, éditeur Charpentier. Tu n’imagines pas une infection pareille. C’est encore plus ignoble que la Vie Parisienne, cette m… à la vanille ! Mon premier mouvement a été d’écrire une lettre d’injures à ces messieurs, en les priant d’ôter mon nom de dessus la couverture, car elle le salit. Mais j’ai eu peur d’avoir l’air de vouloir poser ! et je me suis abstenu. N’importe ! j’en suis encore indigné (sic).

La lecture de la Correspondance inédite de Berlioz m’a remonté. Lis-la, je t’en prie. Voilà un homme ! et un vrai artiste ! Quelle haine de la médiocrité ! Quelles belles colères contre l’infâme bourgeois ! Quel mépris de on ! Cela vous enfonce

  1. Cette revue hebdomadaire, illustrée, était conçue dans un esprit essentiellement élégant et boulevardier.