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CORRESPONDANCE

l’opposition des caractères soit brutale). Le dénouement touche au sublime.

Voilà tout ce que j’avais à vous dire, mon cher ami.

Ma franchise vous prouve le cas que je fais de vous.

Votre très dévoué.


1819. À LA PRINCESSE MATHILDE.
Vendredi [mars 1879]

Vous n’êtes pas « gaie », dites-vous, ma chère Princesse. Mais qui est-ce qui est gai ? Ce n’est pas moi, hélas ! Au moins si on pouvait se lamenter dans la compagnie de ceux qu’on aime, ce serait un soulagement. Si battu que je sois par le sort, si avarié que je me sente, il me semble qu’étant près de vous je pourrais vous distraire un peu de vos ennuis. Pardon de la présomption !

L’hiver est abominable. Cette persistance du mauvais temps vous tape sur les nerfs et la couleur du ciel vous entre dans le cœur. De la fenêtre de mon cabinet, j’aperçois cependant quelques primevères. Que ne puis-je refleurir comme le gazon ! Mais je me calomnie : le fond du bonhomme garde sa jeunesse. Oui, riez de moi, je suis aussi troubadour qu’à dix-huit ans. L’amour du Beau m’a conservé, comme le vinaigre fait aux cornichons.

La mort de M. de Sacy m’a fait de la peine. C’était un aimable homme et un lettré, chose