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DE GUSTAVE FLAUBERT.

J’ai pour samedi prochain un rendez-vous avec Carvalho ; alors je saurai (du moins je l’espère) l’époque où je dois être joué. Ce sera en novembre ou en janvier. Il faut ajuster votre séjour à Paris en conséquence et y rester le plus longtemps possible, pour qu’on ait le temps de se voir, comme au bon vieux temps.

Peut-être vous ferai-je assister à ce qui s’appelle vulgairement un four. L’enthousiasme de Carvalho m’inquiète. Quand on est d’avance si sûr de la victoire, d’ordinaire on reçoit une pile. Je ne crois pas aux gens qui « se connaissent en théâtre ». Cependant ils peuvent quelquefois ne pas se tromper. Après tout, bonsoir ! J’ai fait ce que je devais faire. J’ai écrit une chose légère, mais pas honteuse.

Comme je songe à vous depuis mon petit voyage à Villenauxe, à votre maison, à votre jardin, à tout ! Et je vous dis que vous vous trompez. Si Curtius ne s’est pas jeté deux fois dans son trou, c’est qu’il est mort dès le premier plongeon. Il n’en est pas de même de moi (mais vous ne vous rappelez pas que vous m’avez comparé aux Curtius et aux Decius) et je suis très capable de réitérer mon sacrifice.

Mon été n’a pas eu de désagréments. Ma nièce Caroline est venue ici passer six semaines, et sa gentille compagnie m’a fait du bien, mon existence ordinaire est si esseulée et farouche ! Je m’en vais demain passer quelques jours à Dieppe, puis de là j’irai à Paris chercher des livres, ensuite à Saint-Gratien, puis aux environs de Rambouillet, pour découvrir le paysage où je puis placer mes deux bonshommes. J’ai déjà fouillé