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CORRESPONDANCE

1031. À MADAME DE VOISINS D’AMBRE
(PIERRE CŒUR.)
Croisset, près Rouen, 3 juillet [1869].
Madame,

J’ai lu avec beaucoup d’attention et de plaisir le volume que vous m’avez fait l’honneur de m’envoyer.

Vos contes sont intéressants, et je ne m’étonne pas de leur succès. Ils ont un mérite très grand pour moi, c’est qu’ils sont écrits.

Je suis fâché de voir çà et là dans votre style, dont le fonds est ferme, des tournures toutes faites, des formules usées. Voilà mon seul reproche, mais je suis peut-être le seul homme du monde qui fasse attention à de pareilles fautes. Je n’en sais rien !

Je connais un peu cet Orient que vous décrivez avec passion, et j’admire la fidélité de vos paysages. Vous sentez. C’est le principal. Le chevalier Ali me semble un peu troubadour. Croyez-vous qu’un musulman puisse être aussi romanesque !

La fille du Capitaine est tout près d’être un chef-d’œuvre. Je dis la fille, Mlle Sidoine, et non pas son amant, lequel est humiliant pour les autres par excès d’héroïsme.

Quant aux Filles d’Adam, j’applaudis des deux mains et je m’incline.

Lors de mon prochain voyage à Paris, je prendrai la liberté de me présenter chez vous pour