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DE GUSTAVE FLAUBERT.

que vous voilà maintenant ne reconnaissant plus les choses. Allons donc ! criez ! tonnez ! Prenez votre grande lyre et pincez la corde d’airain : les monstres s’enfuiront. Arrosez-nous avec les gouttes du sang de Thémis blessée.

Pourquoi sentez-vous « les grandes attaches rompues » ? Qu’y a-t-il de rompu ? Vos attaches sont indestructibles, votre sympathie ne peut aller qu’à l’éternel.

Notre ignorance de l’histoire nous fait calomnier notre temps. On a toujours été comme ça. Quelques années de calme nous ont trompés. Voilà tout. Moi aussi, je croyais à l’adoucissement des mœurs. Il faut rayer cette erreur et ne pas s’estimer plus qu’on ne s’estimait du temps de Périclès ou de Shakespeare, époques atroces où on a fait de belles choses. Dites-moi que vous relevez la tête et que vous pensez à votre vieux troubadour qui vous chérit.


1208. À SA NIÈCE CAROLINE.
Croisset, vendredi soir, 6 heures [8 septembre 1871].

Voici le papier que me demande mon beau neveu. Tu l’embrasseras de ma part en lui disant que je continue, de plus belle, à n’y comprendre goutte. Et puis, quelle rédaction ! quel langage ! Moi, signer des choses pareilles ? Horreur !

Tu me combles de compliments sur Saint Antoine, pauvre Caro ! Et je t’avouerai qu’ils me font plaisir, parce que je fais cas de ta jugeotte,