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CORRESPONDANCE

1160. À SA NIÈCE CAROLINE.
Londres, samedi soir [25 mars 1871].
Ma chère Caro,

J’ai reçu tout à l’heure ta lettre de jeudi qui me rassure beaucoup. Comme je suis content que vous soyez revenues à Dieppe !

Je comptais partir demain soir et être près de vous lundi. Mais le paquebot de New-Haven ne part pas le dimanche. Donc mon séjour ici est retardé de vingt-quatre heures et je ne compte pas arriver à Dieppe avant mardi matin. Il est inutile que tu m’envoies Anselme, si Mercier promet d’avoir une de ses voitures sur le quai quand je débarquerai.

Il me semble que Paris reste dans le même état. Aujourd’hui, on n’a reçu à l’ambassade de France (où je vais tous les jours) aucun journal de Paris. Mais nous savons, par un voyageur parti hier soir à 5 heures des Champs-Élysées, que tout était calme. Je n’y comprends goutte !

J’avais pensé à m’en aller par Calais, Boulogne, Amiens et Clères. Mais je n’arriverais à Dieppe que lundi soir au plus tôt, et peut-être serais-je arrêté en route par un convoi de Prussiens. Le plus sûr, je crois, est de prendre le chemin le plus court. Comme il me tarde d’être installé quelque part et travaillant !

Adieu, pauvre chérie, ou plutôt à bientôt. Embrasse ta grand’mère pour moi et tâche de la faire patienter jusqu’à mardi matin.

Mes félicitations à ton époux de ce qu’il a échappé aux balles de « nos frères ».