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DE GUSTAVE FLAUBERT.

la pauvre cervelle est affaiblie par moments. Je n’ai besoin que d’une chose (et celle-là, on ne se la donne pas), c’est d’avoir un enthousiasme quelconque.

Votre avant-dernière était bien triste. Vous aussi, êtes héroïque ; vous vous sentez las ! Que sera-ce donc de nous !

Je viens de relire les Entretiens de Goethe et d’Eckermann. Voilà un homme, ce Goethe ! Mais il avait tout, celui-là, tout pour lui.


1108. À EDMOND DE GONCOURT.
Croisset, lundi soir [début de juillet 1870].
Mon cher Edmond,

Je ne peux pas dire que votre lettre m’ait fait plaisir. Mais j’ai été bien aise d’avoir de vos nouvelles. Il m’ennuyait de ne pas entendre parler de vous, car j’y pense souvent et profondément, je vous assure. Quelle année ! Quelle abominable année ! Je ne compare pas mes chagrins ou mon chagrin au vôtre, mais moi aussi j’ai été vigoureusement calotté et j’en demeure étourdi pour longtemps.

J’ai beau me répéter le mot sublime de Goethe : « Par delà les tombes, en avant ! » ça ne me console pas du tout.

Venez donc ici. Nous causerons d’eux. Si rien ne vous retient là-bas, accourez tout de suite. Je vous attends, parce qu’à la fin de ce mois ou au commencement d’août je serai forcé d’aller à Paris