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CORRESPONDANCE

emboîter mes personnages dans les événements politiques ; les fonds emportent les premiers plans.

J’étais hier soir si éreinté que j’ai lâché ma Princesse ; aussi, croyant que j’étais malade, vient-elle tout à l’heure de m’envoyer un estafier avec un billet (qui m’invite à dîner pour mercredi). Ledit commissionnaire est surchargé de médailles militaires et très grand, ce qui me donne près de mon portier beaucoup de considération ; ce soir, je vais au concert chez son cousin l’Empereur.

Tout à l’heure on vient de m’apporter un billet de faire part m’annonçant la mort de Mme Valazé mère. Je ne puis faire autrement que d’aller à son enterrement.

As-tu lu Thérèse Raquin ? Je trouve ce livre-là très remarquable, quoi qu’on dise. Quant à la Comtesse de Châlis, on n’en parle plus, mais plus du tout. Donne-moi donc des détails sur les femmes de ta bonne maman. Est-ce que, sérieusement, elle renvoie Julie de chez elle ? Pourquoi ? Cette mesure me paraît bien rigoureuse.

Quand venez-vous à Paris ? Il m’ennuie de ta fraîche trombine. L’ « horizon politique » continue à s’assombrir et tout le monde déblatère contre le gouvernement, ce qui ne m’empêche pas, moi, de croire à sa solidité par la raison suivante : il n’y a pas un mot de ralliement, une idée commune, un drapeau quelconque, autour duquel on puisse se grouper. Je défie qui que ce soit de réunir vingt personnes ayant la même opinion active. La question, d’ailleurs, n’est plus politique, et un changement de gouvernement ne la résoudrait pas. La seule chose importante, Madame, c’est la