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DE GUSTAVE FLAUBERT.

rieux ? Je n’en sais rien. C’est robuste, en tout cas, et je ne m’en sens pas la force. J’en ai à peine assez pour tenir une plume.


475. À LOUIS BOUILHET.
Croisset, 28 juin 1855.

Tu ne m’as pas l’air gai, mon pauvre bonhomme. Tes lettres sont de plus en plus « mélancholiques » et tu me parais devenir de plus en plus « méchanique ». C’est un tort, c’est un tort ! Il faut se roidir contre les difficultés. Tu ne prends pas les choses en quantité raisonnable. Tu as trop les pieds dans Paris pour n’en être pas dégoûté et d’autre part tu n’y entres pas assez pour qu’il te plaise. Tu avais ici l’estomac assez solide pour digérer tous les Laurent-Pichat[1] de la terre ; d’où vient ta faiblesse maintenant ? Serait-ce parce que tu connais l’homme ? Qu’importe ! Ne peux-tu, par ta pensée, établir cette superbe ligne de défense intérieure qui vous sépare plus du voisin qu’un océan ?

Et puis, s… n… de D… ! que me chantes-tu avec des phrases pareilles : « Je m’effacerai ainsi du monde graduellement » ? M… ! J’ai envie de te f… des coups de pied quelque part. Que veux-tu que je devienne, misérable, si tu bronches, si tu m’ôtes ma croyance ? Tu es le seul mortel en

  1. Le Cœur à droite, comédie de Bouilhet, venait d’être refusé à la Revue de Paris par Laurent Pichat.