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DE GUSTAVE FLAUBERT.

un lapin sauvage qui s’est réfugié là. J’ai empêché qu’on ne le tuât.

Voilà quatre jours que Narcisse et Édouard s’occupent à abattre et à fendre du bois : aussi vais-je avoir un bûcher bien garni.

Au milieu de ma solitude, j’ai eu ce matin un événement bien agréable, à savoir la visite de l’horloger[1]. Il m’a encore parlé du temps (qu’il trouve toujours beau), mais comme je dormais encore à moitié, je crois avoir perdu deux ou trois rognonnements de la fin. Quel dommage ! en voilà maintenant pour quinze jours ! C’est long à attendre.

Je suis bien aise que les Récits mérovingiens t’amusent ; relis-les quand tu auras fini ; apprends des dates, tu as tes programmes, et passe tous les jours quelque temps à regarder une carte de géographie.

Ma lettre t’arrivera demain soir au moment où vous vous mettrez à table ; je boirai, de mon côté, tout seul, à votre santé.

Adieu, mon pauvre Caro. Sois bien gentille et pense à

Ton vieux qui t’embrasse.

  1. L’horloger, dont la visite se renouvelait tous les quinze jours, était un sujet de gaieté pour Flaubert et sa nièce. « Il avait, dit celle-ci, une perruque jaune, trop petite, sur une figure de poupard, entrait souvent pendant notre déjeuner, prenait avec des précautions infinies une chaise pour remonter la grande pendule Louis XIV, et ne cessait de faire entendre un rognonnement dans lequel on percevait les mots d’ « huile grasse,… échappements. » Il quittait l’appartement en faisant force saluts et sourires. »