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CORRESPONDANCE

pas de quoi faire une fête populaire. Quelle piètre chose que ces éternels mâts vénitiens, ces éternels lampions et ces éternelles bannières ! Sans compter messieurs les agents de police suant dans leurs bottes, pour maintenir l’ordre. « Histoire de l’esprit humain, histoire de la sottise humaine », disait M. de Voltaire.


585. À MADEMOISELLE LEROYER DE CHANTEPIE.
Croisset, 11 juillet [1858].

J’ai trouvé en arrivant ici votre dernière lettre, chère correspondante. Vous me demandez des consolations ; ne vous ai-je pas assez rabâché les mêmes choses. Travaillez excessivement à un travail dur et long. Tout amuse quand on y met de la persévérance : l’homme qui apprendrait par cœur un dictionnaire finirait par y trouver du plaisir ; et puis voyagez, quittez tout, imitez les oiseaux. C’est une des tristesses de la civilisation que d’habiter dans des maisons. Je crois que nous sommes faits pour nous endormir sur le dos en regardant les étoiles. Dans quelques années, l’humanité (par le développement nouveau de locomotion) va revenir à son état nomade. On voyagera d’un bout du monde à l’autre, comme on faisait autrefois, de la prairie à la montagne : cela remettra du calme dans les esprits et de l’air dans les poumons.

Enfin, mon conseil permanent est celui-ci : voulez !