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CORRESPONDANCE

parce que je ne suis pas sûr de les penser moi-même, dans un quart d’heure. J’ai, en un mot, peur de dire des inepties, dont j’aurais un remords immédiat. Quand je vous reverrai cet hiver, à Paris, je vous poserai seulement, sous forme dubitative et modeste, quelques questions.

En résumé, ce qui me plaît avant tout dans votre livre, c’est que l’Art y prédomine. Et puis vous chantez la chair sans l’aimer, d’une façon triste et détachée qui m’est sympathique. Vous êtes résistant comme le marbre et pénétrant comme un brouillard d’Angleterre.

Encore une fois, mille remerciements du cadeau ; je vous serre la main très fort.

À vous.

546. À M. X…[1].
[Croisset] Mercredi 22 juillet [1857].
Mon cher Monsieur,

J’accorde, je vous accorde, je t’accorde, je leur accorde toutes les permissions d’arranger la Bovary à n’importe quelle sauce. Mais la permission vient trop tard puisque vous y avez renoncé, et franchement, mon bon, je crois que vous avez bien fait. La chose me semble, à moi, impossible. Mais je n’entends goutte au théâtre, bien que j’y rêvasse de temps à autre. C’est une méchanique qui me fait grand peur, — et pourtant, c’est beau, nom

  1. Le destinataire de cette lettre est inconnu.