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DE GUSTAVE FLAUBERT.

C’est trop. Si elle a le front comme un marbre, elle ne peut être, elle, comme un arbre.

À tous ses rameaux des fruits sont promis,


fort ingénieux ; mais, encore une fois, cela est trop dans un ordre d’idées étrangères à celle de maternité, de virginité.

Et les blanches fleurs
Et les nids joyeux,


quel dommage que deux si bons vers soient perdus !

L’orage, pour dire le malheur, a été dit par tout le monde, et puis, le pire de tout cela et ce qui m’irrite, ce qui fait que je ne suis peut-être pas impartial, c’est le sujet. Je hais les pièces de vers à ma fille, à mon père, à ma mère, à ma sœur. Ce sont des prostitutions qui me scandalisent (voir le Livre Posthume). Laissez-donc votre cœur et votre famille de côté et ne les détaillez pas au public ! Qu’est-ce que cela dit tout cela ? qu’est-ce que ça a de beau, de bon, d’utile et, je dirai même, de vrai ? Il faut couper court avec la queue lamartinienne et faire de l’art impersonnel ; ou bien, quand on fait du lyrisme individuel, il faut qu’il soit étrange, désordonné, tellement intense enfin que cela devienne une création. Mais quant à dire faiblement ce que tout le monde sent faiblement, non.

Pourquoi donc reviens-tu toujours à toi ? Tu te portes malheur. Tu as fait dans ta vie une œuvre de génie (une œuvre qui fait pleurer, note-le) parce que tu t’es oubliée, que tu t’es souciée des passions des autres et non des tiennes. Il faut