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DE GUSTAVE FLAUBERT.

434. À LOUISE COLET.

En partie inédite.

[Croisset] Dimanche, 5 heures [23 octobre 1853].

Bouilhet m’est revenu fort assombri. Il paraît que vous n’avez pas été gais là-bas. Ce qu’il m’a dit de toi me navre, pauvre chère Louise. Qu’as-tu donc ? Allons, sacré nom de Dieu, relève-toi. Tu as fait une fort belle chose, à ce qu’il paraît. De l’orgueil ! de l’orgueil ! et toujours ! Il n’y a que ça de bon. Tu me verras avec Bouilhet quand il va aller te rejoindre. Que ne puis-je y rester ! Mais je sens, je suis sûr que ce serait une insigne folie, et quand même cette conviction ne serait qu’une idée, comme on dit, ne suffit-il pas que j’aie cette idée pour qu’elle m’empêche et me trouble ? Si l’on pouvait se donner des fois (sic) et en vingt-quatre heures, au milieu d’une œuvre, changer des habitudes de quinze ans, sans que cette œuvre s’en ressente, tu me verrais, dès la fin de la semaine, installé à Paris quoi qu’il en coûte.

Bouilhet est pénétré de ta Servante. Il en trouve le plan très émouvant, la conduite bonne et le vers continuellement ferme. Il ne te reproche qu’une chose, c’est d’avoir fait une allusion trop claire à Musset. Sans me prononcer encore, je penche à être de son avis ; mais il faut voir. D’ici là je m’abstiens. Il m’a dit de très belles choses de cette œuvre ! La représentation au spectacle, la servante servant les actrices ! etc., il paraît que tout cela est