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DE GUSTAVE FLAUBERT.

dormir, et j’avais encore bien des choses à te dire, à te parler de ton drame, etc. Mardi, ne parle pas de Du Camp à Gautier ; laisse-le venir, si tu veux t’en faire un ami. Je crois que le Bouilhet est un sujet qui l’amuse peu. Est-ce se reconnaître médiocre que d’envier quelqu’un ! Mille baisers et tendresses.

J’embrasse tes lèvres.

Ton G.

393. À LOUISE COLET.
[Croisset] Nuit de jeudi, 1 heure [26-27 mai 1853].

Je ferais mieux de continuer à travailler et de t’écrire demain, car je suis ce soir fort animé et dans un grand rut littéraire. Mais comme demain il peut revenir, cela me remettrait trop loin (au plaisir que me font tes lettres, je pense que tu dois bien fort aimer les miennes). Et puis il faut se méfier de ces grands échauffements. Si l’on a alors la vue longue, on l’a souvent trouble. Le bon de ces états-là, c’est qu’ils retrempent et vous infusent dans la plume un sang plus jeune. On a dans la tête toutes sortes de floraisons printanières qui ne durent pas plus que les lilas, qu’une nuit flétrit, mais qui sentent si bon ! As-tu senti quelquefois comme un grand soleil qui venait du fond de toi-même et t’éblouissait ?

Oui, cela a bien marché aujourd’hui. Je me suis à peu près débarrassé d’un dialogue archi-coupé, fort difficile. J’ai écrit aux deux tiers une phrase « pohétique » et esquissé trois mouvements de mon