rons-nous tous deux, à loisir et en liberté ? Voilà encore une longue année devant nous et l’hiver, toi avec les omnibus dans les rues boueuses, les nez rouges, les paletots et le vent sous les portes ; moi avec les arbres dépouillés, la Seine blanche et, six fois par jour, le bateau à vapeur qui passe.
Patience, travaillons. L’été se passera. Après l’été je serai presque à la fin, et ensuite j’irai piquer ma tente près de toi, dans un antre désert, mais où tu seras.
Tu m’as mis à la fin de tes Fantômes. J’en ai aussi, moi, en deçà de toi, et de plus nombreux ! Fantômes possédés, fantômes désirés surtout, ombres égales maintenant. J’ai eu des amours à tous crins, qui reniflaient dans mon cœur, comme des cavales dans les prés. J’en ai eu d’enroulés sur eux-mêmes, de glacés et de longs comme des serpents qui digèrent. J’ai eu plus de concupiscences que je n’ai de cheveux perdus. Eh bien, nous devenons vieux, ma belle ; soyons-nous notre dernier fantôme, notre dernier mensonge ; qu’il soit béni, puisqu’il est doux ! Qu’il dure longtemps, puisqu’il est fort.
Adieu, je t’embrasse toute entière.
En partie inédite.
Nous ne sommes pas, à ce qu’il paraît, dans une bonne passe matérielle. Il y a sympathie (sympathie veut dire qui souffre ensemble) ; sans vou-