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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Vous déclarez que je devais au moins vous envoyer des fleurs le 29 juillet[1]. Vous savez bien que je n’admets pas davantage les devoirs. Vous frappez mal, en voulant frapper trop fort. Je ne ris pas de tout cela cependant comme vous le présumez, car je ne ris plus et pour cause ! Depuis quinze jours surtout, j’ai éprouvé de telles choses que j’en ai perdu l’habitude, pour le moment du moins. Cela reviendra peut-être.

Il me semble pourtant que la lettre que je vous ai écrite de Saint-Malo était affectueuse et bonne. Il paraît que non. Je me trompe peut-être.

Vous êtes comme les autres après tout, comme tout le monde. J’ai beau faire tout ce que je peux, je blesse toujours. Et moi ? Ah mais, on suppose toujours que non. C’est comme un homme qui en tombant d’un clocher en écrase un autre dans sa chute : on plaint beaucoup celui qui a été écrasé, mais celui qui, en écrasant, a été brisé du coup, ah bah ! c’était sa faute !

Quant à la lettre de Fougères, je ne l’ai pas reçue. J’avais dit qu’on la fît suivre à Trouville. À Trouville elle n’y était pas. J’ai écrit hier pour la ravoir. Je suis revenu vite, en toute hâte, et je n’ai pu par conséquent l’avoir. Nous sommes revenus quinze jours plus tôt que nous ne le devions primitivement, ma mère m’ayant écrit de revenir le plus tôt possible. Le pays est accablé de maladies d’enfants. Elle a fui de Croisset et s’est logée ici dans un taudis où j’ai le bonheur d’être. D’un moment à l’autre je m’attends à voir son enfant

  1. Anniversaire de leur première nuit d’amour. Voir lettre no 112, t. I.