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CORRESPONDANCE

Je n’en fais pas le serment, parce que l’on a l’habitude de violer les serments ; mais je dis seulement que cela m’étonnerait fort, vu que le métier d’homme de lettres me répugne prodigieusement.

J’écris pour moi, pour moi seul, comme je fume et comme je dors. C’est une fonction presque animale, tant elle est personnelle et intime.

Je n’ai rien en vue, quand je fais quelque chose, que la réalisation de l’idée, et il me semble que mon œuvre perdrait même tout son sens à être publiée. Il y a des animaux qui vivent dans la terre et des plantes que l’on ne peut pas cueillir et que l’on ignore. Il y a peut-être aussi des esprits créés pour les coins inabordables. À quoi servent-ils ? À rien ! Ne serais-je pas de cette famille ?

Quoi qu’il en soit je m’inocule sainte Thérèse et je commence à lire Aristophane en grec.

Parle-moi de tes affaires littéraires. Quand penses-tu avoir fini ton drame ? etc… etc…

Je ne t’en écris pas plus long ce soir, car je suis excédé par un mal de dents et un mal d’oreilles qui m’ont agacé toute la journée. Quelle sotte mécanique que la nôtre !

Adieu chère amie, mille tendresses pour ton cœur, mille caresses pour ton corps.


201. À LOUISE COLET.

En partie inédite.

Dimanche, 11 h. du soir. [La Bouille, 29 août 1847.]

Non, je suis encore ici à La Bouille et ta lettre écrite mercredi au soir et timbrée de Paris du 26