Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 2.djvu/359

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
353
DE GUSTAVE FLAUBERT.

lume. Il faut laisser cette manière de travailler aux journalistes. J’ai reçu, à propos de journaliste, une lettre de Du Camp, fort aimable. Houssaye est parti de la Revue. Du Camp, du reste, m’a l’air fort content. Si c’est de ses œuvres, il n’est pas difficile. La Revue, dit-il, va bien. Dieu le sait ; mais j’ai peu envie de contribuer à cette gloire.

Lis aussi dans ce dernier numéro le conte de Champfleury. Je suis curieux d’avoir ton avis. As-tu lu la scène de l’écurie dans l’Âne d’or, et la prière à Isis ? Je te recommande, dans les États du Soleil[1], le combat de l’animal glaçon et le royaume des Arbres. Je trouve cela énorme de poésie.

Sais-tu ce que tu devrais faire, ma vieille ? C’est de prendre l’habitude religieuse, tous les jours, de lire un classique pendant au moins une bonne heure.

En fait de vers français, il n’y en a qu’un comme facture, c’est La Fontaine. Hugo vient après, tout plus grand poète qu’il est, et, comme prose, il faudrait pouvoir faire un mélange de Rabelais et de La Bruyère.

Ah ! si je t’avais connue dix ans plus tôt et que j’eusse eu, moi, dix ans de plus ! Mais marche, bon courage ! Tu es en bonne voie et il faut profiter du vent arrière, tant qu’il souffle dans la voile.

Adieu, chère cœur, il est bien tard.

Je t’embrasse tendrement.

À toi. Ton G.

  1. De Cyrano de Bergerac.