Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 2.djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
307
DE GUSTAVE FLAUBERT.

sent leurs robes jusqu’aux aisselles et vous montrent leur C… pour avoir deux ou trois sols. Elles vous poursuivent dans cette posture. C’est encore ce que j’ai vu de plus raide comme prostitution et cynisme. Nous deux Maxime, au bout de la rue, avons laissé tomber notre tête sur notre poitrine et avons soupiré : « Ce pauvre Bouilhet !!! »

C’est à Naples qu’il faut aller pour se retremper de jeunesse, pour aimer la vie. Le soleil même en est amoureux. Tout est gai et facile. Les chevaux portent des bouquets de plumes de paon aux oreilles. La Chiaia est une grande promenade de chênes verts au bord de la mer, arbres en berceau et le murmure des flots derrière.

Tu verras Maxime dans un mois. Je lui envie la bonne embrassade qu’il te donnera et cette fleur du retour que mon égoïsme aurait voulu t’offrir. « Fleur du retour » est bien Sainte-Beuve.

Je compte être à Venise vers le commencement de juin et m’en fais une fête. Je m’y donnerai une bosse de peinture vénitienne dont je suis amoureux. C’est définitivement celle qui m’est la plus sympathique. On dit que ce sont des matérialistes, soit. En tout cas ce sont des coloristes et de crânes poètes.

Adieu, cher vieux de mon cœur, je t’embrasse.


283. À ERNEST CHEVALIER.
Rome, 9 avril 1851.

Je savais, cher Ernest, que tu devais te marier ; ma mère me l’avait écrit, mais j’ignorais que la chose fût faite. Sois heureux, c’est tout ce que je