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DE GUSTAVE FLAUBERT.

d’écarter la foule lorsque nous sommes à photographier. J’espère que c’est chic.

Il n’est pas possible, comme tu vois, d’être mieux. Quant aux ophtalmies, parmi les gens que l’on rencontre il n’y a que ceux de la plus vile condition, comme on dit généralement, qui en soient atteints. Villemain, un jeune docteur d’ici qui est en Égypte depuis cinq ans, me disait ce matin n’en avoir pas vu un seul cas sur un homme aisé, ni sur un Européen. Rassure-toi donc, prends bon courage ; je reviendrai en bon état.

Allons, adieu, pauvre vieille, il est quatre heures. J’ai été dérangé dans ma lettre par la visite de M. Pastri, banquier. C’est lui qui doit nous faire parvenir notre argent et expédier nos bagages si nous envoyons en France quelque momie.

Nous allons de ce pas chez notre ami Soliman prendre une lettre pour demain. Elle est adressée au gouverneur de Rosette afin qu’il nous loge chez lui, c’est-à-dire dans la forteresse, seul endroit logeable, à ce qu’il paraît. Nous avions l’intention de pousser jusqu’à Damiette, mais comme on nous a dit que ce serait trop fatigant à cheval, à cause des sables, nous avons renoncé à la partie ; nous irons du Caire, par bateau. Tu vois que nous ne sommes pas des entêtés. Nous avons pour principe d’écouter l’avis des gens compétents et de nous ménager comme deux petits saints. Adieu, mille baisers, pauvre vieille ; embrasse la petite pour moi. Écris-moi de bien longues lettres. Je te serre à t’étouffer. Ton fils qui t’aime.