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CORRESPONDANCE

des bandes de dix à douze Arabes, tenant toute une rue, s’écarter pour nous laisser passer. Alexandrie, d’ailleurs, est presque un pays Européen, tant il y a d’Européens. Nous sommes, à la table d’hôte de notre hôtel, une trentaine. Tout est plein d’Anglais, d’Italiens, etc. Hier nous avons vu une procession magnifique pour la circoncision du fils d’un riche négociant. Ce matin nous avons déjà vu les aiguilles de Cléopâtre (deux grands obélisques sur le bord de la mer), la colonne de Pompée, les catacombes et les bains de Cléopâtre. Demain nous partons pour Rosette, d’où nous serons revenus dans trois ou quatre jours. Nous allons doucement et sans nous fatiguer, vivant sobrement et couverts de flanelle des pieds à la tête, quoiqu’il fasse trente degrés de chaleur dans les appartements. Ce n’est du reste nullement incommodant, à cause de la brise de mer.

Soliman-Pacha, l’homme le plus puissant de l’Égypte, le vainqueur de Nezim, la terreur de Constantinople, se trouve par hasard à Alexandrie au lieu d’être au Caire. Nous lui avons fait une visite hier, munis de la lettre de Lauvergne. Il nous a admirablement reçus. Il doit nous donner des ordres pour tous les gouverneurs de l’Égypte ; il nous offre sa voiture pour aller au Caire. C’est lui qui a fait le marché pour nos chevaux pour notre course de demain. Il est charmant, cordial, etc. C’est sans doute nos balles qui lui plaisent. De plus, nous avons M. Gallis, l’ingénieur en chef des armées, le bey Prestot, etc. Pour te donner une idée de la manière dont nous allons voyager, on nous donne des soldats afin