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DE GUSTAVE FLAUBERT.

n’est pas plus qu’un voyage à Marseille. Il ira cet hiver à Paris. M. Cloquet te fera faire sa connaissance et tu pourras te rassurer auprès de lui. Il nous a dit qu’il m’y avait en Égypte à craindre ni brigands, ni fièvres, ni ophtalmies (en prenant des précautions). La seule chose qu’il nous ait bien recommandée, c’est d’éviter le froid des nuits. Mais nos flanelles et nos pelisses sont là.

Nous avons visité tantôt notre paquebot, le Nil, par lequel nous devons partir après-demain matin dimanche, à 8 heures. Il est superbe et toi qui aimes surtout les grosses embarcations, il te conviendrait, car c’est le plus gros de tous ceux qui sont dans le port. Le père Cauvière nous à recommandés au capitaine ; nos chambres sont choisies. Le capitaine nous donnera la sienne si je suis trop malade de la mer. Tu vois, pauvre vieille chérie, que l’on soigne ton poulot. Nous avons des balles d’une importance superbe. Sur le paquebot le Rhône on accablait Sassetti de questions pour savoir quelles étaient nos seigneuries. C’est un drôle de garçon qui n’est embarrassé de rien et connaît tout. Il est parti ce matin déjeuner chez la contrebasse du théâtre qui est un de ses amis, ce qui lui a valu d’entendre hier au soir la Juive pour rien, dans l’orchestre, parmi les musiciens, comme un artiste. Je crois que c’est un bon choix. Il nous sert très bien.

Ce matin j’ai reçu de Lauvergne une lettre pour Soliman-Pacha, général en chef de l’armée d’Égypte. J’y suis crânement recommandé. Le paragraphe qui me concerne commence ainsi : « C’est un homme puissant par la pensée » et tout le reste est dans ce goût-là.