Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 1.djvu/78

Cette page a été validée par deux contributeurs.

gnons, durillons, raves, betteraves, moutons, cochons, gigots, aloyaux.

J’en suis venu maintenant à regarder le monde comme un spectacle et à en rire. Que me fait à moi le monde ? Je m’en importunerai peu, je me laisserai aller au courant du cœur et de l’imagination, et si l’on crie trop fort je me retournerai peut-être comme Phocion, pour dire : quel est ce bruit de corneilles !

Tout à toi.

23. AU MÊME.
Rouen, jeudi 11 octobre 1838.

Non, mon cher Ernest, je ne t’ai point oublié et c’est dans l’incertitude de savoir où toi-même tu étais que je me suis abstenu de t’écrire ; en effet, en allant il y a environ une dizaine de jours avec mon père au Vaudreuil, nous nous sommes arrêtés aux Authieux, où le fils Dureau m’a dit qu’il t’avait vu à Elbeuf, et je ne savais pas si tu y étais encore ou bien si tu étais parti dans quelqu’autre contrée porter tes pas et la douce amie qui ne doit jamais te quitter.

Puisque tu seras assez bon garçon pour venir me voir, tâche de venir vers la Toussaint, nous serons plus ensemble et je n’aurai pas le collège pour m’embêter ; il est vrai que je suis maintenant externe libre, ce qui est on ne peut mieux, en attendant que je sois tout à fait parti de cette sacrée nom de Dieu de pétaudière de merde de collège ; mais dès maintenant adieu pour toujours aux pions