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J’ai été hier chez Degouve-Denuncques[1], mon « Commis » sera inséré jeudi prochain et mercredi je corrigerai avec lui les épreuves.

Le père Langlois et Orlowski[2] ont dîné hier à la maison et ils ont passablement bu, mâqué, blagué. Achille, moi et Bizet sommes invités pour dimanche à aller riboter, Fumer et entendre de la musique chez Orlowski. Tous les réfugiés Polonais y seront. Ils sont 30. C’est une fête nationale, tous les dimanches de Pâques il en est ainsi chez l’un d’eux. On mange des saucisses, des boudins, des œufs durs, de la cochonnaille et il n’est permis d’en sortir que saouls et après avoir vomi 5 ou 6 fois.

J’ai une nouvelle agréable à t’apprendre, je puis t’en garantir l’authenticité, elle vient du sieur Ducoudray, pion de Mr  Mainot, et élève en médecine. Il porte un chapeau, une redingote et une chemise. Il m’a donc dit ce matin à l’amphithéâtre que… que… eh bien, que le censeur des études M. C*** qui [a] une chemise sale, des bas sales, une âme sale, et qui enfin est un salop, il m’a dit bref qu’il avait été surpris dans un bordel et qu’il allait être traduit devant le Conseil Académique ; voilà qui est [une bonne] blague. Voilà qui me réjouit, me récrée, me délecte, me fait du bien à la poitrine, au ventre, au cœur, aux entrailles, aux viscères, au diaphragme, etc. Quand je pense à la mine du censeur surpris sur le fait et limant, je me récrie, je ris, je bois, je chante,

  1. Rédacteur au Journal de Rouen : il fit imprimer la nouvelle de Flaubert dans le Colibri du 30 mars 1837. Voir Œuvres de jeunesse inédites, l, 198.
  2. Musicien, professeur de piano de Caroline Flaubert