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DE GUSTAVE FLAUBERT.

moi que j’estime) : j’admire. Toi, tu mêles au Beau un tas de choses étrangères, l’utile, l’agréable, que sais-je ? Tu diras au Philosophe de t’expliquer l’idée du Beau pur, telle qu’il l’a émise dans son cours de 1819 et telle que je la conçois ; nous recauserons de ça la prochaine fois.

Je lis maintenant un drame indien, Sabountala, et je fais du grec ; il ne va pas fort, mon pauvre grec, ta figure vient toujours se placer entre le livre et mes yeux…

Adieu chérie, sois sage, aime-moi bien et je t’aimerai beaucoup, car c’est là ce que tu veux, ma vorace amoureuse. Mille baisers et mille tendresses.


139. À LA MÊME.
Lundi, 10 h. du soir, [14 septembre 1846.]

Quelle étrange fille tu fais ! On ne sait jamais que te dire ni que penser. Tes lettres rient d’un côté et pleurent de l’autre ; tu es pleine de boutades et d’excentricités, quoi que tu dises. Tu m’envoies encore ce matin des choses passablement dures. Tu veux que je m’y fasse ; c’est ma ration quotidienne maintenant. Mais si j’allais finir par m’y habituer ? À force de frapper à la même place, la meurtrissure vient, puis le sang, puis le cal ! Parle-moi donc d’autre chose, au nom du ciel, au nom de moi, puisque tu m’aimes, que de venir à Paris ! On dirait que c’est un parti pris chez toi de me tourmenter avec ce refrain. Mais je me le redis toute la journée, moi ; mais qu’y faire cependant ?