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CORRESPONDANCE

voyais ainsi, l’amour bouderait peut-être, car le grotesque lui fait peur. Mais va, je serai propre quand tu me reverras, comme autrefois, comme tu m’aimes.

Dis-moi si tu te sers de la verveine ; en mets-tu sur tes mouchoirs ? Mets-en sur ta chemise. Mais non, ne te parfume pas ; le meilleur parfum c’est toi, l’exhalaison de ta propre nature. Allons, demain matin peut-être aurai-je une lettre.

Adieu, je te mords ta lèvre. Y est-elle toujours la petite tache rouge ?

Adieu, mille baisers. À lundi peut-être ; je réapprendrai la saveur des tiens.

À toi, à toi corps et âme.


122. À LA MÊME.
Entièrement inédite.
16 août 1846.

La malédiction s’en mêle ! Au reste il en est toujours ainsi. Ne suffit-il pas que nous désirions quelque chose pour que nous ne puissions l’obtenir ? C’est là la loi de la vie !

Impossible me sera d’être à Paris ce soir ; j’ai la tête toute enveloppée de linges et de bouillie, à cause de mes affreux clous qui me tiennent tout le corps. Je suis couché sans pouvoir remuer et écris ceci couché ; mais je me traite avec un acharnement qu’on n’a jamais vu ; nous en rirons ensemble.

Je n’ose croire que j’arriverai à Paris demain mardi. Il se pourrait pourtant, mais n’y compte pas. Ce serait donc pour mercredi, toujours à l’heure dite.