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DE GUSTAVE FLAUBERT.

au sien dans toutes les scènes tendres qui me reviennent maintenant à l’esprit.

Si tu étais la, que de choses j’aurais à te dire ! mon vieil ami, mon vieux camarade, toi qu’elle confondait dans ses jeux et qu’elle ne distinguait pas de son frère.

Quelques jours avant de mourir, elle a parlé de toi dans son délire ; elle croyait que tu étais à la maison. Elle parlait aussi de son père, elle s’étonnait de ne le pas voir. Comme elle a souffert ! comme elle a souffert ! Tantôt elle poussait des cris déchirants ou geignait douloureusement. Il n’y a ni mot ni description qui te puisse donner une idée de l’état de ma mère… J’ai un triste pressentiment sur son compte, et malheureusement je suis payé pour croire à mes pressentiments.

Écris-moi donc longuement, souvent, le plus longuement possible. Où est le temps ou nous nous voyions tous les jours ? Nos pauvres jeudis du collège, où sont-ils ?

Adieu, je t’embrasse bien tendrement.

Fais-moi le plaisir d’envoyer la lettre ci-jointe en y mettant l’adresse. C’est pour Lorelli ; je ne lui avais pas encore répondu.


107. À EMMANUEL VASSE.
[Croisset], 5 avril 1846.

Quand tu m’as quitté la dernière fois, quand tu m’as vu repartir pour Rouen, tu t’es dit sans doute que, le temps venant, les jours s’écoulant, ma