Tu n’es donc pas plus drue[1], mon bon rat ? et le plaisir de m’écrire ne peut te faire oublier tes douleurs ? puisque tu m’avoues à moi-même que tu en as à peine le cœur. Je vous préviens cependant d’une chose, toi et maman : c’est qu’il faut, pendant le séjour que je vais faire à Rouen, que vous soyez aimables, que vous ayez de bonnes figures. Le même avis peut être aussi adressé à la jeune Fargues[2]. Souffrez tant que vous voudrez des reins, de la tête et des engelures ou des piqûres, peu m’importe ; mais faites en sorte de me rendre le logis agréable. De quelque manière que vous vous y preniez je serai toujours mieux qu’ici. Paris n’est pas un pays de Cocagne pour tout le monde et j’y mène une vie assez juridiquement sombre. La capitale, pour les bons provinciaux, est quelque chose de très amusant, remplie de cafés, de restaurants, de glaces, de spectacles et de becs de gaz qui éclairent beaucoup. On est vite fatigué de semblables merveilles. Pour ma part, j’en suis tanné. Puisque ce mot tanné vient de couler sur mon papier, sais-tu, vieux Carolo, dans quelle ville une femme qui voyage est la plus ennuyeuse ? C’est quand elle est à Nantes.
Je respire un peu plus maintenant et je regarde