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chapitre premier.

brebis, etc. Il a donc existé, il existera donc de tout temps des espèces sociales comme il y a des espèces zoologiques. » Ces nombreuses variétés de types humains sont le produit de ce milieu social que précisait Balzac et qui a succédé, comme loi d’évolution pour l’homme, au milieu physique seul connu des animaux. Le fait de vivre en groupes crée à l’homme des conditions de vie fort différentes de celles de l’animalité et transpose d’un ordre à un autre les exigences vitales, par suite leurs conséquences. Si pour un animal le milieu physique a cet effet de lui rendre la nourriture abondante ou rare, si l’herbivore, cantonné comme le renne dans les neiges de Laponie, trouve plus difficilement sa pâture que l’antilope dans les prairies herbues de l’Afrique centrale, est-ce que l’ouvrier de nos cités modernes ne voit pas changer, lui aussi, les conditions pénibles ou faciles de son existence, mais cette fois avec les modifications apportées au milieu social ?

Telles furent les idées maîtresses et dominantes auxquelles se subordonna la conception de la vie chez Balzac : toutes scientifiques, on le voit, et puisées aux sources mêmes des découvertes modernes. Elles dominent son œuvre et la pénètrent, en ce sens que leur salutaire réaction sur la pensée de l’écrivain se fait sentir à chaque tournant ; preuve qu’il ne peut s’agir ici d’une doctrine artificielle, mais au contraire parfaitement assimilée et infusant à son œuvre quelque chose comme un sang nouveau. En effet, si l’on considère, ainsi qu’il le voulait lui-même, les multi-