Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 2, 1909.djvu/53

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
LA PLANÈTE MARS.

le but de faire une répartition générale des eaux devenues rares et cependant parfois menaçantes à la surface des continents aplanis par l’usure des siècles. Sans doute, c’est là une hypothèse ; mais elle n’est pas antiscientifique, et l’aspect géométrique intentionnel de ce réseau de lignes droites l’autorise. Il est à craindre que l’on n’arrive jamais à expliquer les canaux de Mars en éliminant de parti pris la possibilité d’une rectification industrielle des cours d’eau, pas plus que des observateurs placés sur la Lune n’arriveraient à expliquer nos réseaux de chemins de fer en s’obstinant à ne pas vouloir admettre à la surface de la Terre autre chose que les forces aveugles de la nature. Nous ne disons pas : cela est ; nous disons : cela pourrait être, et si l’on trouve une explication complète et meilleure de tout ce que l’on observe sur Mars, nous sommes prêt à l’accepter, celle-ci n’étant que provisoire, en attendant mieux (septembre 1892).

Il n’est pas douteux non plus qu’en certaines saisons les canaux sont vus doubles, formés de deux lignes parallèles. Ce phénomène extraordinaire, constaté depuis 1881, est d’une explication encore plus difficile que celle des canaux. N’y aurait-il pas là quelque réfraction atmosphérique produite par des nuages de glace, comme il arrive chez nous pour les halos et les parhélies, et rappelant de plus ou moins loin la double réfraction du spath d’Islande ?

Quoi qu’il en soit des problèmes actuellement posés par ce monde voisin, nous pouvons dire que, de toutes les planètes de notre système, Mars est la plus intéressante, par les ressemblances — et aussi par les différences — qu’elle offre avec notre patrie terrestre, et nous pouvons répéter ce que William Herschel disait il y a plus d’un siècle : « its inhabitants probably enjoy a situation in many respects similar to ours. »

Comme Descartes et Pascal, Herschel était plus qu’un savant : c’était un penseur.

cxlviii.Observations faites à l’observatoire Lick en 1892.

Voici les observations qui ont été faites à la plus puissante lunette du monde, au mont Hamilton, pendant la même opposition.

M. Holden, Directeur de l’Observatoire Lick, nous écrivait à la date du 16 octobre, que les quatre observateurs du mont Hamilton (MM. Holden, Barnard, Campbell et Hussey) n’ont pas fait moins de cent dessins. Nous reproduisons d’abord ici deux de ces vues télescopiques. La première (fig. 80) est du 17 août et a été prise au grand équatorial par M. Hussey ; grossissement 350. Longitude du méridien central = 84°. On reconnaît en haut la tache polaire, puis, vers le méri-