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W.-H. PICKERING. — MERS ET CANAUX.
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Enfin le changement d’intensité de la coloration des canaux s’explique aussi par l’hypothèse des digues. Quand l’eau d’un grand canal coule dans les canaux secondaires, le canal principal s’appauvrit et devient, par conséquent, plus clair ; il peut même devenir assez clair pour cesser d’être visible pour nous. Il redevient visible quand les canaux secondaires sont barrés où qu’il a reçu lui-même un nouvel afflux de la mer.

Quelque hostile que je sois en général aux hypothèses, je livre la mienne à la publicité, parce qu’elle permet d’expliquer d’une façon toute naturelle et toute simple les phénomènes en apparence énigmatiques et incompréhensibles que nous observons sur Mars. Cette explication n’est pas contredite par les observations, elle n’est basée sur aucune idée inadmissible : on ne saurait demander davantage à une hypothèse.

Ainsi, pour l’auteur, les canaux de Mars ont été construits par d’habiles ingénieurs.

À cette communication, qui avait été même plus agressive que ne le montre l’extrait précédent, envers MM. Lowell et William Pickering (et que nous n’avons pas entièrement reproduite), celui-ci a répondu, de l’Observatoire de Harvard College, dans les termes suivants[1] :

J’ai pris beaucoup d’intérêt à ce que M. Brenner avait à dire en ce qui concerne mon hypothèse. Il expose sa manière de voir avec vigueur, en tirant le meilleur parti possible de ses observations. De plus, sa théorie, due aussi à M. Holtzhey, que les canaux ont été endigués et non creusés me frappe par son ingéniosité. Il y a quelques faits, cependant, que M. Brenner semble ignorer, et sur lesquels je voudrais attirer l’attention.

M. Brenner trouve que la teinte des mers est grise ou brune. En 1894, vers l’époque du solstice d’été de l’hémisphère austral de Mars, M. Lowell les a trouvées d’une couleur vert bleu brillante. À mes yeux, elles n’ont jamais offert cette teinte, bien que nous nous soyons servis du même instrument, à la même époque ; elles m’ont paru, la plupart du temps, d’une couleur gris neutre, caractérisée. Cependant, en 1890, à l’époque de l’équinoxe de printemps de l’hémisphère austral, ces prétendues mers m’ont semblé d’un vert brillant, analogues à celui des jeunes feuilles du printemps. En 1892, à Aréquipa, les premières observations ont révélé le même phénomène. Mais au fur et à mesure que la saison avançait sur la planète, le vert s’est lentement changé en un gris monotone, analogue à celui que j’avais remarqué en 1894 à Flagstaff. Vers la fin de nos observations en 1894, la teinte grise a lentement passé au jaune, et la plupart des taches au sud de 50° de latitude australe ont disparu pour cette raison. Des

  1. Bulletin de la Société astronomique de France du 1er avril 1899, p. 171.