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LE DÉDOUBLEMENT DES CANAUX.

tance de ce dernier à la surface de Mars, on pourra la considérer comme à peu près parabolique, de sorte que la masse aura la forme d’un cylindre parabolique ayant un plan de symétrie perpendiculaire à la surface de la planète. Si maintenant la masse, ayant cette forme, tourne vers le côté en s’éloignant du centre du disque, le spectateur terrestre se trouve en vue de points dont le rayon de courbure va en croissant, de telle sorte que la distance des deux images va continuellement en décroissant d’une manière correspondante. Il se produit donc, par la rotation de la planète autour de son axe, un changement dans la distance des deux images tout à fait semblable au raccourcissement que produirait la perspective. Cela rend encore plus frappante l’illusion qui donne à ces lignes l’aspect de véritables objets à la surface de Mars.

On peut maintenant se demander pourquoi il n’y a que les canaux qui se dédoublent, et pourquoi les bords des continents et des îles ne paraissent jamais doubles. Je crois que l’on peut facilement en donner une raison.

L’énorme masse de vapeur qui doit se rassembler au-dessus d’une mer martienne doit avoir une surface à peu près horizontale. En général, cette surface doit s’abaisser vers le continent, et, comme ici il n’y a plus ce flux intense venant d’une ligne étroite, comme dans le cas d’un canal, l’abaissement est plus graduel, de sorte qu’une courbure brusque de la surface juste au-dessus ou presque au-dessus de la ligne de côte doit être fort peu probable.

Si cet essai d’explication ne répond pas encore à toutes les questions — c’est ainsi, par exemple, que je ne puis encore donner aucune raison pour expliquer la disparition des irrégularités lors du dédoublement, — je crois cependant que la partie essentielle de ces phénomènes remarquables s’explique de la manière indiquée par les lois naturelles connues. Tant que nous ne connaîtrons pas exactement la hauteur et la densité de l’atmosphère de Mars, nous ne pourrons pas traiter plus complètement ce problème par le calcul.

Ferdinand Meisel,
Astronome à Halle.

On peut objecter à cette hypothèse que, s’il y avait autant de vapeur d’eau dans l’atmosphère de Mars, nous devrions y voir des nuages fréquents, ce qui n’est pas. Mais il pourrait exister sur ce monde voisin d’autres gaz ou vapeurs produisant un effet analogue.

M. J. Schneider, astronome à l’Observatoire de Potsdam, a présenté, d’autre part, la réfutation suivante[1] :

M. Meisel suppose que la partie de l’atmosphère de Mars qui se trouve au-dessus d’un canal et qui est saturée de vapeur d’eau possède un indice de réfraction plus grand que la partie environnante moins humide.

Il est vrai que la vapeur d’eau a un indice de réfraction plus grand que notre

  1. L’Astronomie, 1890, p. 49.