Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 2, 1909.djvu/411

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
403
LES ATMOSPHÈRES DES PLANÈTES.

4o Ce grand excès de l’hélium dans quelques sources a sans doute une origine minérale. L’uranium, entre autres, renferme de l’hélium. On n’en pourrait dire autant pour l’argon.

5o L’argon qui est fourni à l’atmosphère par les sources chaudes paraît provenir en principe de l’atmosphère et lui être restitué. Au contraire, il semble qu’il y ait une addition continuelle d’hélium de la terre solide à l’atmosphère qui le perd.

En conséquence, on peut conclure que l’excessivement petite quantité d’hélium qui existe dans l’atmosphère est de l’hélium qui s’en va, et qu’il y en aurait davantage s’il ne s’en échappait pas.

Donc, conclut l’auteur, l’argon ne s’échappe pas de notre planète, mais l’hélium s’en échappe, et, par conséquent, la vapeur d’eau doit s’échapper de la planète Mars, et ainsi nous en déduisons que les neiges polaires de ce monde sont probablement formées d’acide carbonique.

Telle est, dans son ensemble, l’argumentation de M. Johnstone Stoney. Nous avons voulu l’exposer tout entière, sans en rien celer, quoique ce long travail soit plutôt aride — pour nous, traducteur, comme pour le lecteur. Mais il importait d’avoir sous les yeux ce raisonnement, plus ou moins mathématique, afin d’éclairer notre recherche indépendante.

Il nous semble que ces arguments ne suffisent pas encore pour nous convaincre que les neiges martiennes sont formées d’acide carbonique. C’est longuement travaillé, assurément, mais en fait de preuves, nous sommes encore plus exigeants. Prendre pour base de raisonnement que l’hélium s’échappe de notre atmosphère, c’est audacieux, puisqu’elle en contient quelque chose comme dix milliards de tonnes. Rien ne prouve, non plus, que si la Lune a perdu son atmosphère, c’est parce que celle-ci s’est envolée ; elle a pu être absorbée, au contraire. Enfin, examinée en elle-même, la théorie cinétique des gaz reste toujours une hypothèse.

Nous anticiperons un peu sur l’ordre chronologique de cet exposé en ajoutant ici l’objection à la même théorie qui nous a été adressée par M. le colonel du Ligondès.

ccxxxix.Du Ligondès. — Les atmosphères des planètes[1].

On a souvent cherché à expliquer, en s’appuyant sur la théorie cinétique, l’absence de gaz légers dans les atmosphères planétaires. Suivant cette hypothèse, les molécules gazeuses sont animées de vitesses dirigées dans tous les sens, variables d’une molécule à l’autre, mais présentant la même valeur moyenne dans

  1. Bulletin de la Société Astronomique de France, juin 1903.